L'empreinte du vide - chapitre 1
Jean-Guy Tarlescons
L’empreinte du vide
Observatoire des occasions manquées
Chaire de Sociorature
Volume 1
Dépôt légal : juillet 2020
Savigny-Beach
Suisse
Copyright 2020
Jean-Guy Tarlescons
A un envolé
1
Manifeste
Ô toi qui un jour me liras, que sais-tu de l’ennui des immortels ? Zeuss m’a puni d’avoir dérobé aux Dieux le feu et les arts que j’ai remis aux humains mal finis. Moi, Prométhée, j’ai chaque jour le foie dévoré par l’Aigle du Caucase, et chaque nuit mon foie repousse pour se faire à nouveau déchiqueter le lendemain. Eternellement. Mais qui n’a pas ses p'tits soucis ?, comme chantait Brel. Alors je me suis habitué, je n’y pense presque plus. Entre deux picorées, j’essaie de me désennuyer un peu en observant la vie des hommes.
Je plonge dans le cours d’une vie, je me laisse charrier dans ses méandres, je commente, j’apprécie, je critique. Mais je n’interviens pas, je ne suis pas ange-gardien moi : faut laisser faire les spécialistes, comme disaient Ferré et Caussimon. De vieux anars comme on n’en fait plus. Je regarde, je prends des notes, j’archive. Des fois, il y en a qui arrivent à s’échapper. Ni Dieu ni Maître. Mais c’est de plus en plus rare.
Pas grave, j’ai tout mon temps. Je peux saisir n’importe quelle action au vol et j’ai tout loisir de la laisser se dérouler. Je la laisse aller au bout d’elle-même, sans l’interrompre ni la classer ou la juger. C’est alors seulement qu’on peut en retirer un enseignement.
Les sociologues, pauvres mortels, n’ont que quelques misérables décennies pour tenter d’y comprendre quelque chose. Moi, j’ai non seulement tout mon temps mais en plus j’ai une méthode efficace : je collectionne les insoumis. Pas les délinquants avérés, mais les déviants secrets. Nuance !
Dans ma grotte céleste j’ai des archives titanesques ! C’est à peine croyable, le nombre de poètes qui s’ignorent. S’ils s’écoutaient un peu plus, ils condenseraient une énergie colossale.
Mais j’ai confiance, ce n’est qu’une question de temps. Je ne meurs pas, alors je le verrai advenir, nous aurons tout, dans 10.000 ans !... n’est-ce pas Léo ?
En attendant, je continue ma chasse aux papillons, histoire d’étoffer un peu ma collection. Bon, voyons voir… je crois que j’irais bien un peu par là...
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